Chronique d'hiver - Paul Auster

Chronique d’hiver est un ouvrage de Paul Auster, publié en 2012. L’auteur y raconte des fragments de sa vie, en employant la deuxième personne du singulier pour parler de lui. Le récit livre des éléments autobiographiques, mais dans le désordre. Auster part de son corps, évoque son utilisation, ses changements, ses accidents, etc. Il établit la liste des lieux où il a habité et reprend une par une les cicatrices émaillant son visage en décrivant les événements qui les ont créés, il aborde son profond amour envers sa femme et sa mère, ses erreurs, ce qu’il est réellement, sincèrement. L’écrivain fait part des nombreux moments de son existence entre ses six et soixante-quatre ans. Il utilisera la même formule dans les premiers et derniers paragraphes du livre : « Tes pieds sur le sol froid au moment où tu sors du lit et vas jusqu’à la fenêtre. » Principalement à travers le rapport à son corps et la liste des habitations dans lesquelles il a élu domicile, Auster retrace une partie des moments forts de sa vie. Les thèmes abordés sont nombreux, parmi ceux-ci apparaissent notamment : l’inventaire de ses cicatrices, la sensation du froid et du vent, les abus d’Auster, son accident de voiture, ses différents lieux d’habitation, les femmes, la vie et la mort de sa mère, son mariage avec Siri Hustvedt et le fait de vieillir.

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Partie 1 : Extraits choisis des principaux

  • Ses cicatrices
  • À travers une longue introspection concernant son corps, Paul Auster retrace quelques accidents de sa vie ayant marqué définitivement son visage. Extrait : « L’inventaire de tes cicatrices, surtout celles de ton visage que tu peux voir chaque matin quand tu te regardes dans le miroir de la salle de bains pour te raser ou te peigner. Tu y penses rarement, mais chaque fois que tu le fais, tu comprends qu’il s’agit de marques de vie, que cet assortiment de lignes brisées, gravées sur ton visage, sont les lettres d’un alphabet secret qui raconte l’histoire de la personne que tu es, car chaque cicatrice est la trace d’une blessure guérie, et chaque blessure a été provoquée par une collision inattendue avec le monde – autrement dit un accident, quelque chose qui aurait pu ne pas se produire puisque par définition un accident est quelque chose qui ne survient pas nécessairement. »

  • La sensation de l'air et du froid extrême
  • Toujours dans l’exploration de son existence au travers de son corps, Auster évoque à de nombreuses reprises ses sorties dans des conditions climatiques parfois extrêmes. Extrait : « Ce qui fait pression sur toi, qui a toujours fait pression sur toi : l’extérieur, c’est-à-dire l’air ou, plus précisément, ton corps dans l’air qui t’entoure. *…+ Plus tard, si tu as le temps, tu penseras à la chaleur et au froid, aux infinies variétés de pluie, aux brouillards que tu as traversés en trébuchant comme un homme dépourvu d’yeux, à la mitraille démentielle des grêlons dans la maison du Var. Mais c’est le vent qui requiert ton attention à présent, parce que l’air est rarement immobile, et que, au-delà du souffle de néant presque imperceptible qui parfois t’entoure, il y a les brises et les légers zéphyrs, les bourrasques soudaines et les rafales, les mistrals de trois jours que tu as endurés dans la maison du toit de tuiles, les vents de nord-est qui balayent la côte atlantique, les grains et les ouragans, les tornades. »

  • Ses abus
  • L’écrivain se livre sincèrement sur ce qu’il est, ou du moins ce qu’il pense être. Extrait : « Oui, tu bois trop et tu fumes trop, tu as perdu des dents sans te soucier de les faire remplacer, ton régime alimentaire n’obéit pas aux préceptes de la sagesse nutritionnelle contemporaine, mais si tu évites la plupart des légumes, c’est simplement parce que tu ne les aimes pas et que tu trouves difficile, sinon impossible, de manger ce que tu n’aimes pas. *…+ Il ne fait aucun doute que tu es un individu imparfait et blessé, un homme qui porte en lui une blessure depuis le tout début (pourquoi, sinon, aurais-tu passé toute ta vie d’adulte à verser ce sang de mots sur une page ?), et les avantages que tu retires de l’alcool et du tabac te servent de béquilles pour que ton moi puisse tenir debout et se déplacer dans le monde. »

  • Son accident de voiture
  • Auster dévoile l’un des événements les plus choquants de sa vie : son accident de voiture alors qu’il conduisait le véhicule portant sa femme et sa fille. Depuis, ce jour, il est envahi par la honte d’avoir risqué de perdre sa famille en raison d’un manque de patience. Extrait : « L’impact est tonitruant, convulsif, cataclysmique – une explosion si bruyante qu’elle pourrait signer la fin du monde. Tu as l’impression que Zeus a lancé la foudre sur toi et ta famille, et, un instant plus tard, la voiture, impossible à maîtriser, se met à tournoyer, à pivoter follement en dévalant la rue jusqu’à ce qu’elle vienne heurter un réverbère en métal contre lequel, dans un grand choc, elle marque abruptement l’arrêt. Après quoi tout devient silencieux, l’univers entier est enveloppé de silence, et quand tu finis par pouvoir penser de nouveau, c’est d’abord pour te dire que tu es vivant. »

  • Ses domiciles, notamment en France
  • Auster établit la liste des lieux dans lesquels il a habité. Cette énumération lui permet de remonter le fil du temps. Il associe son corps et sa vie aux espaces où il a vécu. Il a passé plusieurs années de sa vie en France, et il évoque à de nombreuses reprises New York, la ville dans laquelle il habite et qui lui est si chère. Extrait : « Espaces clos, habitations, petites et grandes pièces qui ont protégé ton corps du grand air. En commençant par ta naissance à l’hôpital Beth Israel de Newark dans le New Jersey (3 février 1947) et en progressant jusqu’à maintenant (cette froide matinée de janvier 2011), voici les lieux où tu as garé ton corps au fil des ans – les lieux où, pour le meilleur et pour le pire, tu t’es dit chez toi. »

  • Les femmes
  • Auster conte ses aventures, ses amours et ses tourments avec les femmes. Il observe son obsession pour le sexe lors de sa puberté. Il relate ses aventures avec des femmes à qui il s’attachait, mais qui n’étaient pas faites pour lui, ainsi que des relations avec des prostituées, dont une incroyable, tendre, amicale et surprenante jeune femme, lui récitant sans ciller des vers de Baudelaire. Extrait : « Elle s’appelait Sandra, c’était une Française d’à peu près vingt-cinq ans, et pendant que tu la suivais dans l’escalier en colimaçon jusqu’au troisième étage de l’hôtel, elle t’a annoncé que tu serais son dernier client de la nuit et que, par conséquent, il n’y avait nul besoin de se presser, tu pouvais prendre tout le temps que tu voulais. Voilà qui était inouï, en violation de toutes les normes et de tous les codes professionnels, mais il était déjà clair à tes yeux que Sandra n’était pas comme les autres filles qui faisaient le trottoir, qu’il lui manquait la dureté et la froideur qui semblaient nécessairement aller de pair avec ce boulot. »

  • La vie et la mort de sa mère
  • Paul Auster rend un hommage vibrant à sa mère. Celle-ci, malheureuse en ménage auprès de son père, a mis de côté son chagrin en offrant tout son amour à Paul. Elle était, selon l’écrivain, trois femmes différentes, et son décès a entraîné pour lui un grand choc. Il s’est montré incapable de pleurer durant les jours qui ont suivi, mais son corps a fait ressortir toute sa détresse par une sévère crise de panique. Extrait : « Tu ne pouvais pas pleurer. Tu ne pouvais pas exprimer ta peine comme on le fait normalement, et donc ton corps a craqué et il a exprimé ta peine pour toi. Sans les divers autres facteurs qui ont précédé la crise de panique (l’absence de ta femme, l’alcool, le manque de sommeil, le coup de téléphone de ta cousine, le café), peut-être cette crise ne se serait-elle jamais produite. Mais au bout du compte ces éléments n’ont qu’une importance secondaire. La question, c’est de savoir pourquoi tu n’as pas pu te laisser aller pendant les minutes et les heures qui ont suivi la mort de ta mère, pourquoi, pendant deux jours entiers, tu n’as pas été capable de verser la moindre larme pour elle. »

  • Son mariage avec Siri Hustvedt
  • L’écrivain aborde son premier mariage raté, expliquant que, malgré la bonne volonté de chacun, cette union était vouée à l’échec, même si elle lui a donné un fils. Il raconte ensuite sa rencontre avec sa deuxième épouse, Siri Hustvedt, également poète et écrivain. Leur amour a donné naissance à une fille. Auster est profondément épris de sa femme qu’il trouve belle, brillante et terriblement intuitive. Extrait : « C’est pourquoi tu as fait tellement attention à tout ce qui t’entourait cet été-là : ce pays, en effet, était celui où elle avait été petite fille et commencé à être femme, et tu sentais qu’en étudiant les détails de ce paysage tu parviendrais à mieux la connaître, à mieux la comprendre, et à mesure que tu as fait connaissance avec sa mère, son père et ses trois soeurs cadettes les uns après les autres, tu as commencé à comprendre aussi sa famille, ce qui t’a permis de mieux la comprendre, elle, de percevoir la solidité du sol sur lequel elle marchait, car c’était une famille solide, rien à voir avec la famille fracturée et provisoire dans laquelle tu avais grandi, et il ne t’a pas fallu longtemps avant de devenir un des leurs, puisque, pour ton bonheur éternel, cette famille était, désormais, également la tienne. »

  • Vieillir
  • L’écrivain revient à son corps tout au long de l’ouvrage et observe les rappels sur ses états physiques que ce corps ne manque pas de lui faire. Il conclut la fin de son récit en indiquant qu’il est désormais entré dans l’hiver de sa vie. Il cite Joubert, respectueux de son raisonnement à propos de la décrépitude accompagnant la vieillesse et constituant le prélude à la mort, pour ceux qui vivent âgés. Extrait : « Il note, à propos de la fin de vie, une formule non seulement différente, mais bien plus exigeante : Il faut mourir aimable (si on le peut). Cette phrase te touche, surtout par les mots entre parenthèses qui démontrent une rare sensibilité d’esprit, te semble-t-il, une compréhension durement acquise de la difficulté qu’il y a à être aimable, en particulier pour quelqu’un qui est vieux, qui s’enfonce dans la décrépitude et dont d’autres doivent s’occuper. Il n’est probablement pas d’accomplissement humain plus grand que d’être aimable à la fin, que cette fin soit amère ou pas. »
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