Corydon - André Gide

Corydon est un essai d’André Gide, publié en 1924. L’ouvrage est rédigé sous la forme d’un dialogue divisé en quatre parties où Corydon et le narrateur conversent sur l’homosexualité masculine. Gide a décidé de faire éditer ce livre à trois reprises : en 1911, en 1920 et 1924. Les deux premières éditions sont restées anonymes et privées, tandis que la troisième affichait le nom de Gide comme auteur et a été publiée et commercialisée. L’écrivain a d’abord écrit une première version comprenant deux dialogues, puis a achevé son essai en lui ajoutant deux autres dialogues. Ayant fait lire son ouvrage à ses proches, ceux-ci lui auraient conseillé de ne pas le publier, craignant un scandale retentissant faisant écho à sa vie publique et privée. En 1924, Gide décide finalement d’aller au bout de sa démarche en publiant à son nom cet essai défendant l’uranisme et la pédérastie.

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Partie 1 : Les personnages

  • Le narrateur
  • Le narrateur est un homme hétérosexuel cherchant à éclairer son jugement sur l’uranisme, alors fortement décrié. Pour ce faire, il rend visite à Corydon, l’une de ses anciennes connaissances de lycée. Il ne l’a plus rencontré depuis une dizaine d’années et a entendu dire qu’il entretenait des moeurs douteuses. Se souvenant que Corydon est un homme brillant, il décide de l’interroger sur le sujet qui l’intéresse.

  • Corydon
  • Corydon est une connaissance amicale du narrateur. Anciennement étudiant en médecine, sa réputation d’homosexuel le dessert. Il prépare l’écriture d’un livre portant sur la Défense de la Pédérastie et évoque avec son ancien ami les principaux thèmes de projet.


    Partie 2 : Le résumé

  • Premier dialogue
  • En l’an 190, un procès scandaleux remet à l’ordre du jour la question de l’uranisme. Le narrateur y constate, navré, que l’homosexualité de l’accusé occupe toutes les conversations. S’agaçant d’entendre à ce sujet toujours les mêmes affirmations venant d’ignorants, il décide de se faire son propre avis en sollicitant Corydon, un ancien ami ayant la réputation d’être homosexuel. Il le retrouve et Corydon lui explique qu’il prépare la rédaction de la Défense de la pédérastie, essai pour lequel il s’est considérablement documenté. Corydon relate à son ami pourquoi il souhaite prendre le risque de se montrer ouvertement homosexuel et d’écrire un livre qui choquera l’opinion publique. Corydon lui expose qu’il a mis du temps à savoir qu’il était attiré par les hommes, la société orientant automatiquement les hommes vers les femmes. À l’âge d’homme, il est tombé amoureux d’une jeune femme. Celle-ci est morte depuis, et il lui voue toujours une immense affection. Sincèrement admiratif de l’âme de celle-ci, il n’a pas réalisé qu’il n’éprouvait aucune passion pour elle. Ce qu’il considérait ainsi comme une vertu – ne pas avoir de sexualité avant le mariage – était en fait une absence de désir pour sa bien-aimée. Le frère de celle-ci, un adolescent, était amoureux de lui. Corydon explique que lorsque le jeune homme lui a fait part de ses sentiments, Corydon l’a violemment rejeté, sûrement dégoûté par sa propre attirance envers lui. Meurtri, le jeune homme n’a pas trouvé d’autre issue que le suicide. Cette mort a profondément choqué Corydon qui, depuis ce jour, s’est beaucoup questionné sur ce qu’il était et pourquoi sa sexualité entraînait tant de haine et de désapprobation. Corydon présente par la suite les différentes parties de son essai. Les deux amis vont débattre ardemment, le narrateur se montrant souvent sarcastique sur les arguments avancés par Corydon. Toutefois, le fait que celui-ci les étaye d’exemples observés dans la nature et de passages de littérature le fait souvent réfléchir. Corydon entreprend de « guérir » d’autres hommes homosexuels à sa manière : en les persuadant qu’ils ne sont pas malades.

  • Deuxième dialogue
  • L’histoire naturelle figure comme la première partie du projet de Corydon. Il cite en premier lieu Pascal qui a écrit : « Sans doute que la nature n’est pas si uniforme. C’est la coutume qui fait donc cela, car elle contraint la nature ; et quelquefois la nature la surmonte, et retient l’homme dans son instinct, malgré toute coutume, bonne ou mauvaise. » Corydon considère que les gens jugent selon la coutume en ne tenant pour naturel que l’hétérosexualité. Il lutte contre l’idée répandue que la pédérastie serait « contre nature ». Il avance pour cela que l’amour et l’instinct sexuel précipitant un sexe vers l’autre sont des inventions humaines et que dans la nature ils n’existent pas. L’animal, comme l’homme, ne recherchent pas la fécondation, mais la volupté. Corydon cite notamment les travaux de Lester Ward, soutenant que la nature aurait pu se passer du mâle : « La couleur normale des oiseaux est celle des petits et de la femelle ; la couleur du mâle est le résultat de son excessive variabilité. Les femelles ne peuvent pas varier ainsi, elles représentent le centre de gravité du système biologique. […] Le changement, ou progrès, comme on peut l’appeler, s’est produit exclusivement chez le mâle, la femelle ne subissant pas de modification. C’est pourquoi l’on dit si souvent que la femelle représente l’hérédité et le mâle la variation. » Cette théorie montre également que le mâle, après avoir commencé par être complémentaire de la femelle, tend à garder de la matière liée à la reproduction. Cette surabondance inutilisée pour la reproduction semble être une constante dans la nature. Pour la fécondation, le mâle est indispensable à la femelle, mais pour la volupté la femelle ne l'est pas pour le mâle. Les animaux mâles sont attirés par les femelles seulement lorsqu’elles sont en période de rut. Ainsi, l’odeur de la femelle en rut les excite, mais ce moment est rare dans l’année et en dehors le mâle ne désire pas la femelle. Cette surabondance constante ainsi que la somme des éléments nécessaires à la nature pour assurer la perpétuation des espèces rendent étonnants le discrédit jeté sur les pratiques homosexuelles pour maintenir au coefficient voulu l’hétérosexualité humaine.

  • Troisième dialogue
  • La deuxième partie abordée entre les deux hommes concerne la littérature, l’histoire et les arts. Corydon observe que dans le monde animal, la femme attire le mâle lors de ses menstrues, mais que ce constat n’est pas vrai chez les hommes. Pour illustrer cette remarque, Corydon cite Spinoza : « Les affections des animaux diffèrent des affections des hommes autant que leur nature diffère de l’humaine […] La volupté de l’un se sépare naturellement de la volupté de l’autre autant que la nature de l‘un diffère de la nature de l’autre. » Corydon expose que dans le monde animal apparaît l’éclatante suprématie de la beauté masculine — les mâles disposant par exemple de couleurs et de formes destinées à plaire aux femelles — et que dans l’espèce humaine ce constat est renversé dans la mesure où ce sont les femmes qui s’apprêtent et se maquillent. Toutefois, sans ces parures, il se pourrait que les hommes soient plus beaux. L’art grec pourrait témoigner de cette opinion, notamment dans les représentations des hommes et des adolescents présentes entre autres dans les statues. Par extension, les Grecs dans l’Antiquité ont encouragé la pédérastie. Corydon évoque que les périodes les plus glorieuses et saines ont pu voir s’épanouir de nombreuses oeuvres en lien avec l’uranisme, lorsque l’art est spontané et sans artifice. Par ailleurs, il souligne à quel point le jeune homme est, par la société, incité à aller vers la femme, comme si elle seule pouvait lui dispenser du plaisir et lui apprendre la sexualité. Ainsi, il estime que pour la plupart des adolescents le désir se réveillant n’est pas toujours clairement précis et que la volupté peut être atteinte aussi bien avec un sexe qu’un autre.

  • Quatrième dialogue
  • Cette dernière conversation porte sur la sociologie et la morale. Corydon revient au début de ce quatrième dialogue sur une affirmation essentielle de sa théorie : « Le mâle a beaucoup plus à dépenser qu’il ne convient pour répondre à la fonction reproductive de l’autre sexe et assurer la reproduction de l’espèce. La dépense à laquelle l’invite la nature est assez incommode à régler et risque de devenir préjudiciable au bon ordre de la société telle que les peuples occidentaux la comprennent. » Corydon insiste sur la sagesse de la civilisation grecque, qui est enseignée et mise en valeur dans tous les systèmes d’éducation, alors qu’elle soutenait la pédérastie pour le bon fonctionnement de la société. Selon lui, soit les hommes deviennent des saints, soit ils peuvent être amenés à souiller les jeunes femmes et détourner les épouses en raison de leurs désirs. En Grèce, le désir de l’homme s’adressait aux hommes, car la femme était respectée et représentait la maternité. Corydon réfute les thèses enfermant l’homosexualité seulement comme une manifestation de races efféminées ou de peuples décadents. Il met en avant le fait que l’uranisme s’accompagne d’un grand respect de la femme. En revanche, lorsque la femme est convoitée elle devient souvent moins honorée. Corydon cite en exemple la pédérastie grecque où l’adolescent est éduqué sexuellement par un amant : « Si l’adolescent tombe dans les mains d’une femme, cela peut lui être funeste […] Mais comme, à cet âge trop tendre, l’adolescent ne saurait faire encore qu’un assez médiocre amoureux, il n’est heureusement pas naturel qu’une femme aussitôt s’en éprenne. De treize à vingt-deux ans (pour reprendre l’âge assigné par La Bruyère) c’est, pour les Grecs, l’âge de la camaraderie amoureuse, de l’exaltation commune, de la plus noble émulation. Après quoi seulement le garçon selon leurs voeux “souhaite de devenir un homme”, c’est-à-dire songe à la femme – c’est-à-dire : à se marier. » Cette conclusion de Corydon fait partir son ami sans qu’il prononce le moindre mot. Celui-ci étant assuré que parfois un silence répond mieux que toute autre argumentation.
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