Illusions Perdues "Un grand homme de province à Paris" - Honoré de Balzac 20.00 / 20

Ecrivain prolifique ayant vécu au 19ème siècle, Honoré de Balzac est l’auteur d’une vaste fresque romanesque, « La comédie Humaine », qui regroupe plus d’une centaine d’œuvres. Cette entreprise d’écriture colossale répondait au désir de l’auteur de dresser le portrait le plus riche possible de la société de son époque. « Illusions perdues » est l’un des plus longs romans de Balzac qui le considérait comme un élément capital de « La comédie Humaine ». Composé de trois tomes, il fut publié entre 1836 et 1843 et retrace l’histoire de Lucien Rubempré, un jeune provincial avide de gloire qui sera confronté dans son désir d’ascension à de multiples difficultés puis à l’amère désillusion de ses espoirs.
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L’extrait que nous allons étudier se situe dans la seconde partie d' « Illusions perdues » et met en scène Lucien Rubempré accompagné de son ami Etienne qui lui fait découvrir le « Panorama Dramatique », une salle de spectacle de la capitale.

 

Nous nous pencherons dans cette étude sur la nature ambivalente du lieu visité par les deux personnages. Espace tout d’abord attrayant du mystère et du spectacle, le « Panorama Dramatique » s’avère particulièrement décevant après un examen plus minutieux qui révèle aux yeux de Lucien un univers factice où l’hypocrisie et les faux semblants règnent en maître.

 

I) Un lieu mystérieux et décevant

 

a) Une visite à première vue attrayante

 

Les deux personnages visitent des lieux généralement non accessibles au public. En habitué, Lousteau prend les commandes de la visite et permet à Lucien de découvrir les derrières du décor. Cette initiative est séduisante en ce qu’elle relève de l’inhabituel pour un homme de province tel que Lucien, d’autant plus que tout participe à entretenir un certain mystère. En effet, les deux personnages ne peuvent accéder aux coulisses que par l’intermédiaire d’un portier : « Sur un signe de Lousteau, le portier de l’Orchestre prit une petite clef et ouvrit une porte perdue dans un gros mur ». L’entrée des coulisses ressemble presque à un passage secret simplement accessible aux initiés. Grâce à Lousteau, Lucien bénéficie d’un traitement privilégié.

 

Une fois passée la porte, les deux personnages accèdent à un corridor : « Lucien suivit son ami, et passa soudain du corridor illuminé au trou noir qui, dans presque tous les théâtres, sert de communication entre la salle et les coulisses. » Le passage de la lumière à l’ombre symbolise l’entrée de Lucien et Lousteau dans un lieu qu’ils ne sont pas censés voir. Le corridor est un lieu de transition qui sépare le monde des spectateurs de celui des acteurs. Lucien est ainsi invité à voir ce qu’il n’est pas censé voir. L’autorisation qu’il a d’accéder à l’interdit aiguise sa curiosité et participe à rendre sa visite attrayante.

 

b) La désillusion

 

Tout au long de l’extrait, plusieurs indices permettent de constater l’insalubrité des lieux. En effet les marches des escaliers sont « humides » tandis que les portants se distinguent par leur « étroitesse ». Le décor est vétuste et témoigne d’un évident manque d’argent. Lucien ne peut ainsi s’empêcher d’être étonné face à ce décor décevant. Sa visite des coulisses le confronte à une réalité bien moins séduisante que ce qu’il avait aperçu en tant que spectateur.

 

En effet, vue de près les décorations sont « horribles », les vêtements des comédiens faits d’étoffes « grossières ». Cette vue globale des coulisses permet au personnage d’embrasser la scène avec une certaine déception : « cet ensemble de choses bouffonnes, tristes, sales, affreuses, éclatantes ressemblait si peu à ce que Lucien avait vu de sa place au théâtre que son étonnement fut sans bornes. » On ressent ici toute la mesure de la désillusion de Lucien. Le grotesque pathétique de la réalité vient ternir l’image idéale qu’il s’était fait des lieux.

 

A l’image des acteurs au visage plâtré de fard, le décor de la salle révèle ses grossières imperfections lorsqu’il est vu de près. Lousteau achève la déception de Lucien en décrivant la salle de spectacle comme « une vraie cuisine » : tout n’y est que médiocrité.

 

II) Un univers factice

 

a) L’ironie de l’auteur

 

On peut constater dans cet extrait plusieurs traits d’ironie de la part du narrateur omniscient. En effet ce dernier nomme Lucien par la périphrase « le poète de province ». Cette appellation vise à souligner la naïveté et la candeur du personnage confronté à la crudité de la vérité. N’étant pas coutumier de la vie nocturne de la capitale, Lucien fait figure d’étranger dans l’univers factice de cette salle de spectacle. Crédule, il s’est laissé berner par l’apparence fastueuse des lieux tandis qu’il les observait de loin. Mais encore, on peut une nouvelle fois déceler l’ironie du narrateur lorsque ce dernier fait référence au « bon gros mélodrame » joué sur scène.

 

L’emploi du langage familier vise à souligner la médiocrité du spectacle en cours. Il ne s’agit pas d’une pièce de qualité mais d’une vulgaire imitation d’une tragédie de Maturin « qu’estimaient infiniment Nodier, lord Byron et Walter Scott, mais qui n’obtint aucun succès à Paris. ». La précision du narrateur selon laquelle la pièce jouée est l’imitation d’une tragédie, genre théâtral noble par excellence, accentue le grotesque de la scène. L’établissement se donne des airs de théâtre mais n’a ni les moyens ni les capacités d’en faire réellement. Tout n’est que tromperie et dissimulation.

 

a) L’hypocrisie ambiante

 

Dans l’espoir de rencontrer Florine, Etienne s’adresse à une actrice en multipliant les surnoms affectueux : «Florine est-elle dans sa loge, mon bijou ? », «Allons, ne manque pas ton effet, ma petite, lui dit Lousteau. ». Le ton doucereux du personnage est repris par l’actrice qui l’appelle à son tour « Mon amour ». Tous ces surnoms habituellement réservés aux personnes entretenant une réelle intimité relèvent ici d’une exagération grotesque. Etienne et l’actrice ne sont pas dans l’authenticité. Leur gentillesse est le fruit d’une hypocrisie toute formelle et permet à l’auteur de mettre en avant le caractère superficiel des personnages.

 

Mais cette hypocrisie prend une nouvelle ampleur lorsque l’actrice à qui s’adresse Etienne exécute les recommandations que ce dernier lui a données : « Lucien stupéfait vit l’actrice se composant en s’écriant : Arrête, malheureux ! de manière à le glacer d’effroi. Ce n’était plus la même femme. » Même en dehors de la scène les acteurs continuent de jouer la comédie et la complicité d’Etienne rend ce dernier aussi faux que les autres. Dans tout cet environnement, Lucien semble la seule personne authentique.

 

Conclusion

 

C’est avec réalisme que Balzac traite dans ce passage du pouvoir séducteur des apparences à travers le personnage de Lucien. Le lecteur suit le regard du personnage qui évolue en tant que privilégié dans un lieu au mystère attrayant. Pourtant, derrière le faste apparent du monde de la nuit se cache la décevante réalité de la médiocrité et de l’hypocrisie. La description péjorative de ces lieux permet ainsi à Balzac de pointer du doigt l’hypocrisie d’une société qui se sert des apparences pour mieux tromper et séduire son prochain.
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4 commentaires


Anonyme
Anonyme
Posté le 30 avr. 2015

Un magnifique livre

Anonyme
Anonyme
Posté le 3 févr. 2015

CEST VRAIMENT MAGNIFIQUE

Anonyme
Anonyme
Posté le 3 févr. 2015

 

Anonyme
Anonyme
Posté le 9 janv. 2014

Illusions perdues est un grand roman de Balzac ! Superbe fiche de lecture !

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